Samedi midi, comme convenu, les négociateurs ont présenté à Laurent Fabius leur brouillon, validé par les 195 pays.
Ce grand pas n'est, pour autant, pas la fin du marathon du Bourget... Le pré-accord comporte encore de nombreuses pages (43) et surtout de nombreuses options parmi lesquelles il va falloir arbitrer. Ce sera maintenant le rôle des politiques, qui ont cinq jours pour remettre leur copie.
Pour accélérer le processus, Laurent Fabius a mis en place un nouveau mode de travail qui assure plus de transparence aux débats, notamment vis-à-vis des associations non négociatrices. Peut-être une manière de confronter les récalcitrants à l'opinion publique ? Et un "Comité de Paris" regroupant 14 ministres "facilitateurs" issus de différents pays, chargés de débloquer les questions épineuses.
Au niveau des réalisations, a été créée une "Alliance mondiale de la géothermie" regroupant 59 pays et institutions visant à mieux exploiter cette ressource souvent délaissée malgré son potentiel. Enfin, l'Arabie saoudite a gagné le "Prix fossile", sorte de bonnet d'âne du plus mauvais élève...
Article du Monde
- Que contient le texte de l’accord ?
En dépit des coups de frein et des coups de semonce qui ont émaillé la première semaine, l’équipe de M. Fabius dispose désormais d’un projet d’accord, obtenu dans les délais. Long de 43 pages, le document est un peu plus clair que la version examinée à l’ouverture de la COP et intègre des propositions de compromis sur chaque grand chapitre de la négociation (atténuation, adaptation, financement, etc.), même s’il comporte encore quelque 900 crochets à supprimer. Le document est complété par cinq pages de « notes de réflexion » reflétant les débats de vendredi sur ces propositions.
- Quel est le calendrier ?
Une centaine de ministres, issus des 195 Etats de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), s’en sont emparés dès dimanche, avec l’espoir de conclure, le 11 décembre à 18 heures, un accord universel et contraignant, apte à maintenir le réchauffement planétaire sous le seuil des 2 °C.
« Le projet reste à approfondir et à concrétiser d’ici vendredi, a expliqué le président de la COP21 à la tribune de l’assemblée. En fait, d’ici jeudi au plus tard, pour respecter les délais nécessaires à la validation juridique du texte par les pays et à son indispensable traduction. »
- Quelle est la méthode adoptée pour parvenir à un accord ?
Ce calendrier serré a peu de chance d’être tenu sans une méthode pointue. M. Fabius en a esquissé les grandes lignes samedi soir. Un « comité de Paris », placé sous sa présidence, se réunira au moins une fois par jour afin de faire le point sur l’avancée des négociations. Il prendra la forme d’une « instance unique ouverte à tous, dont les travaux seront retransmis [sur les écrans disposés dans les couloirs du Bourget] », a précisé le chef de la diplomatie française, qui semble avoir tiré les leçons de la dernière session de Bonn, mi-octobre.
Exclus des réunions de travail à la demande de certains pays, les observateurs de la société civile avaient alors exigé du secrétariat de la CCNUCC qu’il assure plus de transparence pendant la conférence de Paris. « On a vu, toute la première semaine, les gens suivre les débats sur les écrans de télévision à l’extérieur des salles. On va essayer d’ouvrir le plus possible les travaux », dit-on dans l’équipe de la COP21.
L’idée d’un comité de pilotage, où soient rapportés régulièrement les avancées et les obstacles de la négociation, n’est pas nouvelle. « Le format ressemble à celui de Durban », s’est même félicitée la déléguée sud-africaine et porte-parole du G77 + Chine (la large coalition de 134 pays en développement), Nozipho Mxakato Diseko. « Ce comité a un rôle décisif, insiste Laurence Tubiana, la chef négociatrice pour la France. Il est le garant d’une vision globale des débats. Pendant plus d’un an et demi, le travail s’est fait en silo, sur des points très précis. »
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Quels sont les points qu’il reste à régler ?
Les quatre groupes thématiques présidés par des ministres « cofacilitateurs » du Nord et du Sud, qui se sont réunis une première fois dimanche, s’en sont inspirés. Ils ont pour mission de régler les grands dossiers du projet d’accord : les « moyens de mise en œuvre », autrement dit les questions de financement et de transfert de technologies ; le thème de la différenciation, qui renvoie à la responsabilité historique des pays développés dans les émissions de gaz à effet de serre ; l’« ambition » de l’accord, son objectif de long terme et ses mécanismes de révision ; les actions à prendre avant 2020, date prévue d’entrée en vigueur de l’accord.
« Le ministre Fabius est l’homme des heures à venir, estime Jennifer Morgan, la directrice du programme climat du think tank américain World Resources Institute. La présidence française a construit les conditions d’un accord, maintenant elle se met vraiment à la tâche. »